Attendant patiemment devant la bouilloire, Sonya tapotait gentiment la surface de la table avec ses ongles, sans se rendre compte de l'agacement que ce bruit pouvait bien engendrer. Heureusement pour elle, elle était seule à la maison. Enfin, sa fille dormait déjà paisiblement dans sa chambre à coucher. Ce qu'elle attendait, ou plutôt, qui elle attendait, était sa soeur Lilas. Depuis quelques temps, elle avait du mal à la cerner. En fait, depuis qu'elle était venue en pleures chez elle pour lui demander de l'héberger un moment, ce qu'elle avait accepté de faire sans hésiter. Toute fois, cette dernière avait refusé de lui donner ne serait-ce qu'une bride d'information sur ce qui s'était produit ce fameux soir et depuis, Sonya n'avait pas l'esprit en paix. Elle avait donc tout planifié ce soir, telle une araignée tissant son piège pour attraper sa victime. Elle avait couché Crystal de bonne heure, avait préparé des biscuits, du gâteau et avait gardé de la lasagne au chaud pour sa soeur, puis était maintenant entrain de préparer du café, question de la garder réveillée. Elle avait l'intention de tourner longtemps autour du pot, puis d'emmener la question discrètement et insister jusqu'à ce qu'elle ne la mette au parfum. Il faut dire que depuis cette fameuse nuit, elle n'arrêtait pas de se faire des scénarios d'horreurs dans son esprit, allant jusqu'à penser à une bagarre qui aurait tourné au meurtre. Quoi qu'il en soit, elle avait besoin de réponses et même si elle s'était jurée de laisser de l'espace à Lilas, elle voulait au moins tenter le coup. Sûrement cette dernière allait-elle mal prendre cette petite intervention, mais peu importe.

Ce qui avait motivé ce soudain besoin de tout comprendre dans l'immédiat? L'ex petit ami de sa soeur, bien entendu. Ce dernier, que Sonya ne connaissait pas le moins du monde, était venu la supplier de parler à sa soeur et de lui demander de lui donner une deuxième chance. Chose encore plus étrange, elle ne l'avait jamais croisé. Il avait fallut qu'Étienne, le videur du bar, le mette à la porte pour qu'il cesse ses supplications acharnées. Non seulement c'était pour le moins étrange, mais elle pensait être en droit d'au moins savoir ce qui se tramait pour pouvoir agir en conséquence si ce garçon revenant l'importuner ainsi sur son lieu de travail. Si ça se trouvait, ça n'avait absolument rien à voir avec cette fameuse nuit, mais elle allait au moins essayer de comprendre s'il y avait ou non un rapprochement. Alors qu'elle retirait enfin la bouilloire pour servir deux tasses de café, elle entendit la porte d'entrée s'ouvrir. Il devait s'agir de Lilas, sans aucun doute. "Je suis dans la cuisine!" Elle avait crié de sorte à ce que sa voix porte jusqu'à l'entrée.